Algérie : le nouvel acteur puissant à venir du tourisme maghrébin

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Aero-News (tourisme maghrébin) – Alger, la resplendissante capitale de l’AlgérieAlger, la resplendissante capitale de l’Algérie Longtemps en retrait, l’Algérie se met en ordre de bataille touristique. Entre reconnaissance médiatique internationale, premiers assouplissements d’accès au Sahara et vagues d’investissements hôteliers, le pays dispose d’atouts capables de rebattre les cartes au Maghreb. De quoi bousculer la Tunisie et le Maroc… ou alors, créer un nouvel équilibre régional ?

Ce n’est pas un classement chiffré, mais une curation éditoriale qui met chaque année en avant des destinations jugées inspirantes par la rédaction (nouvelles expériences, accessibilité, ouverture d’infrastructures, singularité culturelle, durabilité). Être sélectionnée signifie que la destination entre dans la conversation mondiale auprès d’un lectorat premium (US/UK notamment) et des prescripteurs (agences sur-mesure, TO haut de gamme, conciergeries, journalistes lifestyle).

Timgad, un trésor archéologique algérien très peu connuLes effets d’une telle reconnaissance peuvent être immédiats : hausse des requêtes des voyageurs, reprise de l’information par d’autres médias, curiosité du trade (tests d’itinéraires 7-10 jours), signaux lancés du côté du transport aérien et du contenu social (créateurs, photographes). En clair, le label Condé Nast Traveler ne remplace ni les visas, ni les lits, ni le service, mais il accélère l’envie. Et au Maghreb, ceci peut s’avérer suffisant pour chahuter certaines positions établies par le Maroc et la Tunisie depuis plus de soixante ans.

Sur l’offre d’investissements, les projets se multiplient (hôtellerie, écolodges, camps d’aventure), avec une volonté affichée de dépasser le seul segment beaucoup plus classique qu’est celui des affaires ou des visites familiales.

Sur l’accès, l’Algérie assouplit l’entrée vers le Sahara via des dispositifs encadrés, ce qui représente de manière évidente un levier clé pour capter la demande “aventure” et photo-trip, encore peu servie à grande échelle.

En face, deux modèles de tourisme installés : le Maroc et la Tunisie

  • Le Maroc se distingue par son écosystème à l’échelle (capacité, routes aériennes, distribution, formation du personnel, storytelling, marque-pays, filières fournisseurs…). L’avance structurelle est réelle, portée par une image bien ancrée et des produits variés (ville, désert, montagne, littoral). La destination inclut également le secteur de l’hôtellerie du luxe. Elle accueillait en 2024 plus de 17,4 millions de touristes et engendrait des recettes touristiques dépassant les 10 milliards d’euros, soit une croissance de 7% par rapport à 2023.
  • La Tunisie regagne du terrain, mais reste loin derrière le Maroc, même si ses volumes reviennent au plus haut, en termes de nombre de touristes. Le pays a du mal, malgré les efforts de diversion touristique, à se défaire d’une image de pays de tourisme de masse (la proposition prix/plage est solide, le patrimoine est majeur et la niche bien-être/thalasso reste quasi unique au sud de la Méditerranée). Le défi pour le tourisme tunisien reste la montée en valeur et la diversification au-delà du “tout inclus” qui n’avantage en rien les acteurs du tourisme, hors hôtellerie. La Tunisie accueillait en 2024 plus de 10,2 millions de touristes et engendrait des recettes touristiques dépassant les 2 milliards d’euros.

Parc national de Tassili n’Ajjer en AlgérieL’Algérie peut-elle “chahuter” ses voisins ?

Oui, elle le peut, elle en a les moyens et la volonté, sur trois segments précis :

  1. Aventure & grands espaces : Tassili, Hoggar, ergs sahariens — un imaginaire puissant encore peu consommé, susceptible de détourner une part de la demande du désert marocain ou des circuits sahariens tunisiens.
  2. Culture & littoral préservé : sites romains majeurs, villes ottomanes, côte méditerranéenne préservée — de quoi parler à une clientèle “curieuse-culture” déjà acquise au Maroc et à la Tunisie.
  3. Capacité d’investissement : si l’exécution suit (standards, distribution, formation), la montée en puissance peut être rapide et ressentie comme un véritable danger par ses concurrents marocain et tunisien.

Pourtant, le match n’est pas encore joué. L’Algérie doit encore fluidifier les formalités (au-delà du Sahara), muscler la connectivité aérienne, fiabiliser l’expérience (normes de service, multilingue, sécurité) et installer un récit de marque clair. Sans ces briques, l’effet Condé Nast restera surtout médiatique.

Le scénario probable résidera, et cela est tout à fait normal, dans la concurrence… mais peut aussi se situer dans la complémentarité. Plutôt qu’un jeu à somme nulle, on peut imaginer un effet d’entraînement maghrébin : réouverture de lignes, combinés régionaux (Alger – Sud saharien – Carthage – Marrakech), montée en gamme des expériences. Les gagnants seront ceux qui :

  • Sécurisent l’accès (e-visa, corridors aériens),
  • Diversifient l’offre (désert, culture, nature, bien-être),
  • Rassurent sur le service (standards, formation, hospitalité).

En conclusion, l’Algérie entre dans la cour des destinations désirables : la sélection Condé Nast Traveler joue le rôle d’accélérateur d’attention. Le Maroc conserve son avance structurelle et la Tunisie son ancrage populaire et bien-être, mais ces deux pays devront défendre des parts sur les niches aventure/culture.

Il serait bien téméraire de sous-estimer l’impact de l’Algérie : dotée de moyens, d’atouts encore peu consommés et d’une jeunesse décidée, la destination a tout pour faire bouger les lignes du tourisme maghrébin.